la dette publique grecque est insoutenable. C’est clairement reconnu par le FMI, la Banque centrale européenne (BCE), les USA, et même désormais par le gouvernement allemand. Pourtant, l’accord du 13 juillet ne comprend aucune clause sur la dette…
Il est seulement indiqué que des « mesures additionnelles » d’allègement de dette pourraient être envisagées si le gouvernement grec tenait ses engagements. Pour des raisons politiques, il était hors de question pour les gouvernements européens de faire la moindre « concession » à Tsipras sur la dette. L’enjeu était d’humilier et d’obtenir une capitulation totale associée à une mise sous tutelle du pays.
Entre 1950 et 1980, la dette publique grecque est restée stable autour de 25 % du PIB. Sous Papandréou père, la crise et les taux d’intérêts élevés ont fait exploser la dette qui a atteint 100 % du PIB au début des années 1990. Après une période de stabilité entre 1993 et 2007, la dette s’est envolée à 170 % du PIB en 2011. C’est la conséquence de la crise mondiale, qui a été considérablement accentuée en Grèce par le cadre de l’euro.
La dette a alors été restructurée en 2012, non pas par générosité, mais pour tenter de la rendre « soutenable », c’est-à-dire que la Grèce continue à payer (un maximum) sans faire défaut. Les créanciers privés (principalement les banques) ont subi une perte d’environ 50 % de leurs créances. 107 milliards de dette ont été effacées. Concrètement, les créanciers ont échangé leurs anciennes obligations contre des nouvelles de valeur plus faible et de durée plus longue. En outre, les créanciers publics se sont substitués aux créanciers privés.
Aujourd’hui, les États européens, via le FESF (fonds européen de stabilité financière) ou par des prêts bilatéraux, détiennent environ 60 % de la dette grecque, et la BCE et le FMI un peu moins de 10 % chacun. La Grèce « bénéficie » en outre d’une période de grâce (suspension des remboursements) de 10 ans pour les prêts du FESF.
Non à la restructuration, oui à l’annulation totale !
Aujourd’hui, la dette publique est plus faible qu’avant la restructuration de 2012, mais comme le PIB a chuté en parallèle, elle n’a pas baissé en pourcentage du PIB. Elle est de 315 milliards, soit plus de 175 % du PIB. Elle est donc toujours insoutenable et une nouvelle restructuration est objectivement nécessaire.
Le FMI anticipe désormais une dette à 200 % du PIB d’ici deux ans, et suggère trois solutions pour rendre soutenable la dette : une période de grâce de 30 ans sur les prêts européens, des transferts annuels européens à la Grèce ou un effacement (« haircut ») partiel de la dette de l’ordre de 30 % du PIB (environ 50 milliards). La piste des transferts est hors sujet car il faudrait qu’il existe un État européen fédéral. Celle d’un haircut est explicitement exclue par l’accord du 13 juillet. La seule piste envisageable est celle d’une restructuration sans effacement de la dette : suspension de certains remboursements, baisse des taux d’intérêts, etc.
Restructurer la dette, c’est le traitement classique d’une dette insoutenable dans un cadre capitaliste. C’est la solution défendue par les libéraux et les antilibéraux, avec des nuances sur l’importance de la restructuration. Mais la logique est la même : alléger le fardeau sans le faire disparaître, pour que le système continue à fonctionner. Notre logique est opposée : annuler totalement la dette pour que le fardeau disparaisse. Cela implique de dynamiter le système pour en construire un autre, émancipé du crédit lucratif et de la propriété capitaliste.